
Quand êtes-vous entré à Rennes 2 et pour y suivre quelles études ?
J’ai eu mon bac en 1993 et je suis entré en première année d’histoire, dans un parcours pour ceux et celles qui ne voulaient pas enseigner mais aller vers d’autres métiers. J’étais déjà passionné de photo, et je voulais en faire à travers le journalisme.
En troisième année, j’ai suivi une licence avec une option mention documentation, qui portait sur les métiers du livre et ldes nouvelles technologies. Internet est né pendant mon cursus universitaire, on commençait à avoir un e-mail sans trop savoir quoi en faire encore.
Lors de ma maîtrise, j’ai voulu faire un mémoire de recherche. J’ai travaillé sur les notions de pittoresque et d’exotisme dans le journal d’illustration entre 1860 et 1880. Cette période marque un basculement des mentalités, en pleine période coloniale et d’éveil des nationalismes, et une transition technique puisque la photogravure a commencé à émerger.
Comment est née votre passion pour la photographie ?
Mon père en faisait, et mes parents m’ont aidé à acheter mon premier appareil photo Reflex au lycée. J’ai adhéré à un photo-club, je trouvais ça chouette. Bon, je ne pense pas que j’étais un bon photographe à l’époque [rires]... Mais j’allais voir des expos, j’étais curieux, et je le suis toujours.
Vous travailliez en parallèle de vos études ?
Oui, j’ai travaillé pendant trois ans au service logistique de la fac, pendant les vacances universitaires. J’ai fait plein de missions : déménagements de meubles à la BU, rangement des réserves… Puis, j’ai fait du tri et de la distribution de copies d’examens. C’était sympa et plutôt bien payé à l’époque.
Étiez-vous impliqué dans la vie culturelle de l’université ?
J’ai fait une expo à Rennes 2 en tant qu’étudiant. Quand j’ai fait mes études, le bâtiment de la Présidence n’était pas encore terminé, la Chambre claire n’existait donc pas. Mais il y avait un espace dans le kiosque du hall B juste à côté de l’amphi De Martonne. J’y ai exposé une quinzaine de tirages au printemps 1998, des photos prises en stop en Écosse. Il y avait du passage, donc c’était une expo d’une certaine envergure. J’étais très content !
En parallèle, j’ai notamment couvert la mobilisation contre la loi Juppé et différents événements culturels pour la radio C Lab (à l’époque Radio Campus Rennes) et le service culturel.
Aujourd’hui encore, je garde des liens avec le service culturel de Rennes 2 : je fais des visites commentées pour l’équipe, je viens régulièrement voir les expositions à la Chambre Claire et le Carré d’Art est impliqué dans le festival Glaz, un de leurs partenaires.

Médiation au Carré d'Art. Crédit : Carré d'Art
Qu’avez-vous fait après avoir obtenu votre diplôme ?
Et bien justement, je n’ai pas terminé mon mémoire et validé mon master car j’ai commencé à travailler durant cette année universitaire. Il se trouve que j’avais rencontré au lycée, alors qu’il était préparateur en physique-chimie, le premier conseiller artistique du Carré d’Art, Claude Carret. Sa femme Marie-Jo et lui sont bien connus pour leur travail sur les Tziganes d’Europe de l’Est, et il est devenu un peu mon “parrain” en photographie. En mai 1998, il m’a parlé d’un poste qui s’ouvrait au Carré d’Art, galerie d’art municipale à Chartres-de-Bretagne. À l’époque, il s’agissait d’un des rares lieux d’exposition photographique à Rennes, avec le Triangle. J’ai été recruté pour un contrat aidé de 5 ans, puis j’ai été titularisé, et c’est ainsi que je suis devenu fonctionnaire. J’ai passé un seul entretien et envoyé un seul CV dans ma vie : c’était pour ce poste !
En quoi consiste votre travail ?
À mon arrivée, j’étais chargé des expositions en complément du programmateur. Mon rôle était d’organiser la régie (accrochages, décrochages), la communication, les événements publics et la médiation, notamment avec les écoles. J’ai appris sur le tas, grâce à l’équipe, aux conseillers artistiques et aux photographes.
Ce que je fais aujourd’hui a évolué : les méthodes ne sont plus les mêmes, et les activités se sont professionnalisées. Nous avons développé des partenariats, des résidences d’artistes et des éditions (ouvrages liés aux résidences). Nous avons aussi commencé à travailler à l’international, en accueillant des photographes étrangers.
Depuis 2020, je fais également la programmation en plus du reste. J’ai maintenant une personne qui m’aide quelques heures par semaine pour concevoir les projets.
Le Carré d’Art est aujourd’hui membre du réseau Diagonal, qui regroupe 30 lieux de photographie en France. Cela nous permet de mutualiser les expositions et d’avoir plus de visibilité dans la communauté artistique.
Quel lien faites-vous entre votre formation et votre métier actuel ?
Je ne pense pas que mon parcours universitaire m’a directement mené à ce métier, mais mes années à la fac ont été une période très enrichissante. Si les examens n’avaient pas existé, j’aurais continué mes études avec grand plaisir !
J’ai eu de super profs et j’ai acquis une aisance à l’écrit qui m’a été utile dans mon travail.
Mon mémoire portait sur l’histoire et la photographie. Aujourd’hui, je m’intéresse énormément à la photo ancienne et aux premiers procédés photographiques. Nous avons même monté des projets autour de ce sujet, et je pense que mon mémoire a éveillé cette curiosité, même si je l’ai approfondie avec le temps.
Que préférez-vous dans votre métier ?
Je n’ai pas de préférence, et c’est justement ce que j’aime. Mon métier est très polyvalent : médiation, communication, régie, scénographie, relations avec les photographes…
Ce que j’aime le moins, c’est la partie administrative : faire des demandes de subventions, des bilans, du suivi budgétaire… Mais c’est nécessaire.
J’adore rencontrer des photographes, même si tous les projets ne se concrétisent pas. J’ai aussi la chance de faire des lectures de portfolios dans des festivals, notamment à Arles. C’est un exercice délicat, mais parfois, il y a de vrais moments de grâce qui débouchent sur des collaborations.
Que conseilleriez-vous aux étudiant·es qui rêvent de devenir responsables de galerie ?
Peu après mon arrivée au Carré d’Art, le master Métiers de l’exposition (MAE) a été créé à Rennes 2. Il existe aussi le master Gestion et Mise en valeur des œuvres d’art, des objets ethnographiques et techniques. Je pense que ce sont de très bonnes formations et j’accueille d’ailleurs en stage au printemps une étudiante de MAE.